Retour sur l’été 2011. Jah Warren et l’équipe de Karement Roots ont rencontré Patrice au festival Couleurs Urbaines de Toulon. Interview exclusive.
Fréquence K : Bonjour, on t’appelle Babatunde. Peux-tu nous dire d’où vient ce nom?
Patrice : Je m’appelle Patrice Babatunde. Babatunde est un nom Yoruba (une langue qui vient du Nigéria) qui signifie le retour ou la renaissance du père. Je suis né le jour où mon grand père de Sierra Leone est mort. J’ai donc hérité de ce nom quand il nous a quittés. Je ne l’ai donc jamais rencontré mais je lui dois beaucoup car ce nom représente l’esprit ancien de mon grand-père maternel.
FK : Quand as tu réalisé que tu voulais devenir chanteur et musicien ?
P : Assez jeune en fait, je prenais beaucoup de plaisir en chantant et assez rapidement j’ai senti que c’était un peu ma destinée. Je voulais changer le monde avec ma musique. J’ai voulu enregistrer un album à l’âge de 15 ans, j’ai commencé à enregistrer des chansons mais tout est vraiment sorti 3 ans après. A cet âge là tu sais, j’ai écrit pas mal de chansons des premiers albums comme Fear Rules, Lions ou encore You always you.
FK : Quelles sont tes influences? De 2 points de vue, musical et spirituel?
P : (Musical)J’aime beaucoup Bob Marley. Je ne voulais pas faire la même musique que lui mais il m’a beaucoup influencé quand même. C’est surtout parce que j’adore vraiment ses chansons et sa musique en général. Il en est de même pour des artistes reggae comme Sizzla, Anthony B ou encore Capleton, j’aimais beaucoup leurs chansons à leurs débuts. Il y a aussi des artistes comme Stevie Wonder et Fela…
Mon père avait l’habitude de m’emmener dans les concerts de Blues… Je me suis éclaté avec Champion Jack Dupree, tu sais, les vieux artistes de blues. Son concert était peut être le 1er que j’ai vu, c’était « Pretty Mind Blowing » qui fut ma 1ère expérience en live.
(Spirituel)Beaucoup d’artistes africains. Mon père reste celui m’a le plus inspiré… Tu as aussi Bob Marley, Martin Luther King, Ghandi, Marcus Garvey aussi, c’est juste que pour moi la meilleure forme de résistance est la non violence. La violence ne me dérange pas à partir du moment où ca peut résoudre des problèmes mais vu que la plupart du temps rien n’est résolu, je préfère la non violence. Non pas que je suis hippie ou quelque chose du genre mais c’est juste que c’est le meilleur remède.
FK : Dans tes premiers albums “Lions” et “Ancient Spirit”, la consonance reggae est vraiment présente. A part dans l’album avec Silly Walks, je dirais que le reste de tes albums se situe plus dans la World musique ou encore la pop-folk musique. Comment peux-tu analyser l’évolution de tes albums ? Qu’est ce que tu as voulu faire avec l’album « One » et pourquoi l’as-tu appelé « One » ?
P : « One » raconte mon histoire jusqu’à cet album. J’essaie toujours de faire de mon mieux à chaque fois. Dans « One », j’essaie d’associer les contrastes, comme peuvent l’être par exemple l’Afrique et l’Europe, la musique classique et la musique rythmée. J’ai essayé de faire une nouvelle sorte de musique, de redéfinir mon identité. J’ai voulu faire une sorte de mix qui ne soit pas un mix mais qui ait une consonance unique, comme un élément à part entière, par exemple l’eau, le feu ou l’air, bref quelque chose de pur. Et c’est comme cela que je l’entends, ce n’est pas vraiment comme un concept : je teste plein de choses et dès que ca correspond bien à la chanson, c’est dans cette direction que je pars quand je fais de la musique. J’essaie de sortir des doctrines et concepts.
Bob Marley n’a pas vraiment fait de reggae à la fin de sa vie… bien sûr qu’il faisait du reggae mais il a surtout ouvert cette musique à tout le monde. Par exemple, son dernier projet était de construire un studio en Jamaïque où on pouvait enregistrer des orchestres. Il a vraiment voulu aller sur un autre chemin, à cette période ce n’était pas très apprécié des Jamaïquains. Ce n’est que quand le succès est venu que les Jamaïquains ont vraiment commencé à idolâtrer Bob et c’est quelque chose qui m’a beaucoup inspiré car je crois qu’il faut savoir sortir des cases pour essayer d’être plus grand qu’un seul genre, d’être libre en musique. C’est vraiment ce que j’ai essayé de faire avec cet album.
FK : Quels sont tes liens avec l’Afrique et la Jamaïque? Y as-tu déjà joué ?
P : J’ai joué en Jamaïque et en Afrique mais beaucoup plus en Afrique.
FK : Où en Afrique? Sénégal, Mali pour le festival « au désert », en Sierra Leone, à l’île de la Réunion et également en Afrique du Sud.
FK : Et en Jamaïque? J’y ai joué une fois. La Jamaïque est un endroit bien différent. P : Il y a tellement d’artistes. Si tu vas jouer là bas, tu dois chanter sur des riddims assez connus, tendances.
FK : Mais est ce que c’est dur de jouer là bas?
P : Tu peux jouer là bas si c’est ce que tu veux. C’est bien si tu veux être dans la mouvance actuelle mais je préfère jouer ma propre musique.
FK : Combien de temps prends-tu pour faire un album? Car tu es toujours sur scène, sur la route et tu as aussi une famille, un petit garçon…
P : Ca dépend. J’ai fait l’album avec Silly Walks en 1 semaine. Seulement? Je l’ai écrit et enregistré en 1 semaine, j’ai essayé de le faire rapidement, sur une 1ère inspiration.
FK : Mais tu avais écrit les paroles avant?
P : Non pas vraiment, j’ai commencé de rien. Je peux écrire très vite quand je me mets la pression. Des fois, ca peut prendre des années. Pour « One », ca m’a pris un an. En fait, ça dépend vraiment. Par exemple, rien qu’en ce moment, je produis beaucoup. Je viens de finir la production du dernier album de Coddie ChesnuTT qui devrait sortir à la fin de l’été. Tu connais aussi Selah Sue. Je viens juste de produire son 1er album. En fait je fais de la musique tout le temps, sous n’importe quelle forme.
FK : Est ce que tu es beaucoup influencé par les musiques étrangères car ces artistes peuvent utiliser différents instruments?
P : Oui bien sûr. Mon studio est un véritable terrain de jeu pour la musique. J’ai en ma possession tellement d’instruments venus d’ailleurs que j’en ai essayés beaucoup.
FK : Que penses-tu du groupe Toguna? Les as-tu aidé à produire l’album ou est ce que tu les as conseillés ?
P :Non ils sont juste venus enregistrer. Evidemment, vu que leur album a été mixé dans mon studio avec 1 de mes principaux techniciens, ils font partie de la famille. Ils ont aussi travaillé avec Soul, mon bassiste qui fait partie du groupe « Supowers » et Richie, qui représentent à eux 2 notre section rythmique de base. Je les apprécie vraiment…
FK : Tu chantes toujours en anglais? As-tu jamais chanté en allemand ?
P : Je ne pense pas que l’allemand soit une belle langue pour le chant.
FK : Mais chanter en allemand peut être aussi joli. Par exemple, Max avec la chanson « Nur du »…
P : C’est sûr, il est bon, mais il vient du hip hop et il est capable d’embellir la langue allemande… Tout le monde ne peut pas le faire. Si je chantais en allemand, je ne serais pas ici aujourd’hui. Quand j’écris en allemand, j’utilise les mots courants. Une fois, j’en ai fait une en allemand mais cela ressemblait plus à un poème qu’à une chanson, you know .Pour les poèmes, c’est vraiment mieux.
FK : Qu’est ce que tu penses de l’endroit ? Du festival Couleurs Urbaines ?
P : Très bien, c’est bien cool ici. C’est un très bon spot pour le skate (Patrice a passé une partie de l’après midi à faire du skate avec son fils) et il y a beaucoup d’espaces pour les enfants, c’est vraiment sympa.
Interview réalisée par Karement Roots (Juin 2011)
2 Commentaires
Bonjour,
Merci pour l’interview.
Ce serait sympa de vérifier/corriger les noms d’artistes : Notamment “Cody ChesnuTT” et le bassiste “Soul”.
Auteur
Yes
Merci pour les corrections à faire!
C’est fait!!!